Ce livre, édité par Kontre Kulture, se décline sous la forme d’une pièce de théâtre et il relate les échanges entre les différentes parties du procès qui oppose l’essayiste Alain Soral au milliardaire Pierre Bergé. L’ancien compagnon d’Yves Saint-Laurent avait, effectivement, intenté un procès pour diffamation suite à des propos tenus dans le livre d’échange entre Alain Soral et Eric Naulleau, Dialogues désaccordés. L’ouvrage, qui était consacré à des sujets de société très divers, a été définitivement retiré de la vente en mars 2016, suite à la décision de la cour d’appel favorable à Pierre Bergé.
Ce qui frappe d’emblée, dans le livre Pierre Bergé censeur, c’est la différence de niveau entre Alain Soral et les membres du tribunal chargés de son interrogatoire. Alors que l’intellectuel français répond de manière précise, logique et éloquente aux questions et aux remarques du président du tribunal et de l’avocat général, on ne peut pas en dire autant de ces deux dernières personnes. En effet, elles ne semblent pas maîtriser la logique, leurs remarques sont souvent hors de propos et elles font mine de ne pas vouloir comprendre les explications patiemment énoncées par l’essayiste. Ces professionnels du droit ne parviennent tout simplement pas à lui porter la contradiction.
Pour paraphraser Alain Soral, « cela correspond aux procès de Moscou quand un brave militant communiste, qui à un moment donné se trouve en porte-à-faux pour des raisons de lutte de pouvoir, est passé à la question par un commissaire politique qui essaie de lui expliquer par A plus B qu’il est tombé dans le déviationnisme petit-bourgeois. C’est exactement le même genre de procédure, de malhonnêteté , de violence et d’abattement que cela peut produire. »
Lorsqu’on lit le compte-rendu de ce procès, on réalise à quel point la liberté d’expression s’est effondrée en France. Alain Soral se situe dans cette tradition française de droit à la critique, au pamphlet et à l’ironie. Or, il n’est même plus permis de faire de l’ironie à propos d’un vieux milliardaire homosexuel qui milite avec acharnement pour la Procréation médicalement assistée (PMA) et la Gestation pour autrui (GPA).
Malgré les explications claires d’Alain Soral et malgré une défense brillante de Maître Damien Viguier et de Maître Lahcen Drici, le tribunal persiste à donner raison à Pierre Bergé. Le procès semble bel et bien joué d’avance. Compte tenu du fait que la photo d’Alain Soral figure sur le « Mur des cons » du Syndicat de la magistrature (SM), comment peut-on croire que l’institution judiciaire est capable de faire preuve d’impartialité à l’égard du fondateur d’Egalité&Réconciliation? Dès lors, on comprend pourquoi Alain Soral envisage de demander l’asile politique à la Corée du Nord. Ce procès indique que nous avons affaire à une véritable persécution à l’égard d’un dissident en France.
Cet ouvrage, élaboré sous la direction de Maître Damien Viguier, est non seulement un outil intéressant pour les étudiants en droit, mais également pour tout citoyen qui souhaite s’informer des limites et des défauts du système judiciaire français.
Alimuddin Usmani