Maurice Barrès (1862-1923) est un écrivain et homme politique français. Né dans les Vosges, il sera marqué par la guerre franco-allemande de 1870 et la perte de l’Alsace-Lorraine. Nationaliste républicain, attaché aux traditions, aux racines, à la famille, à l’armée et à la terre natale, il affirmera ses idées socialistes, lorsqu’il sera élu député boulangiste en 1989, en siégeant à l’extrême gauche de l’hémicycle.
Scènes et doctrines du nationalisme, ce sont d’abord des scènes ; Barrès nous fait revivre le procès Dreyfus et déplore avant tout le déchirement de la France qui accompagna cette affaire : « C’est l’intérêt national, le salut public qui devrait intervenir et interdire un procès d’où fatalement allaient découler des difficultés graves que notre France dissociée et décérébrée n’est pas en mesure de résoudre. » Il y a pour Barrès quelque chose de plus fort que la raison d’État : c’est l’intérêt national. Et c’est du point de vue de la défense de cet intérêt national qu’il nous raconte ici les événements qui ont marqué son époque, dont le scandale de Panama, autre scène de grande ampleur de cette fin du XIXe siècle.
Scènes et doctrines du nationalisme, ce sont ensuite des doctrines, sous forme de discours, de pensées, de lettres. En homme enraciné, Barrès n’extrait pas les idées ou les événements de leur contexte : « Par rapport à quoi cette chose est-elle bonne ou vraie ? » Ce qui est bon est ce qui permet « à l’arbre dont je suis une des feuilles de persévérer dans l’être ». Pour permettre à chacun de ne pas « rompre avec sa continuité naturelle », de ne pas se déraciner, il importe d’assurer à tous, et surtout aux plus faibles, la sécurité économique. Ainsi, le nationalisme de Barrès est un protectionnisme qui, parce qu’il est « le souci des grands intérêts de la patrie », veut que l’on emploie toutes les énergies. Mais comment « refaire de l’énergie française », se demande-t-il, alors que pour bien des intellectuels de son époque la patrie n’est plus qu’une « idée » ? Aujourd’hui que l’« idée » est devenue ultralibérale et multiculturelle, on peut entendre que la France n’est plus qu’un « hôtel ». La question de Barrès se pose donc avec plus d’acuité encore ; le lire permet de remonter aux sources, de comprendre la filiation des pensées qui ont mené la France à la déchéance intellectuelle et morale dans laquelle nous sommes.
Enfin, pour nous redonner une lueur d’espoir, Scènes et doctrines du nationalisme c’est aussi le programme politique avec lequel Barrès se présenta devant les électeurs, propositions concrètes pour le relèvement de la France que nous pourrions, pour beaucoup d’entre elles, reprendre avec profit.
Léon Blum fait un très beau portrait de lui dans le petit livre qu’il écrivit dans les années 30 et qui est intitulé « Souvenirs sur l’affaire » (l’affaire Dreyfus évidemment). Aussi bizarre que cela puisse paraître, une profonde amitié liée ces deux personnalités si différentes.